La Haute Cour Constitutionnelle,
Vu la Constitution ;
Vu l’ordonnance n°2001-003 du 18 novembre 2001 portant loi organique relative à la Haute Cour Constitutionnelle ;
Le rapporteur ayant été entendu ;
Après en avoir délibéré conformément à la loi

Considérant que par lettre n°144-PM/Cab du 25 juillet 2012, le Premier Ministre, Chef du Gouvernement, demande l’avis de la juridiction constitutionnelle sur l’applicabilité du projet de loi n°027-2008 du 29 octobre 2008 sur les exportations ;

Considérant que l’Assemblée Nationale et le Sénat, après avoir examiné le projet de loi sus-évoqué, ont procédé à son adoption en octobre 2008 ;

Considérant que dans la lettre sus-référencée, le Premier Ministre, Chef du Gouvernement, relève que la loi sur les exportations, adoptée par le Parlement, n’a pas été promulguée par le Président de la République ;

Qu’alors, au cas où le Gouvernement souhaite faire annuler la loi, il est demandé à la Haute Cour Constitutionnelle d’indiquer la procédure qui devra être suivie ;

EN LA FORME

Considérant qu’en application des dispositions de l’article 119 de la Constitution, le Premier Ministre, Chef de Gouvernement, en sa qualité de Chef d’institution, est habilité à saisir la Haute Cour Constitutionnelle pour donner son avis sur l’interprétation d’une disposition de la Constitution ;

Considérant que la présente demande d’avis porte sur un cas de non-promulgation de loi et, par conséquent, sur l’effet de la non-promulgation quant à l’applicabilité de la loi ;

Considérant ainsi que la demande, régulière en la forme, doit être déclarée recevable ;

AU FOND

Considérant que la loi sur les exportations d’octobre 2008 a été adoptée suivant la procédure législative prescrite par la Constitution révisée en octobre 2007 de la Troisième République ;

Considérant qu’aux termes des dispositions de l’article 58 en son alinéa premier de ladite Constitution : « Le Président de la République promulgue les lois dans les trois semaines qui suivent la transmission par l’Assemblée Nationale de la loi définitivement adoptée » ;

Considérant que la promulgation doit être définie comme l’acte par lequel le Président de la République constate que la procédure prévue par la Constitution pour l’adoption des lois a été bien suivie, vérifie le texte de loi, et lui donne son authenticité, rend, enfin, la loi exécutoire ;

Considérant que le Président de la République n’a pas procédé à la promulgation de la loi sur les exportations adoptée par le Parlement en l’année 2008 ;

Considérant en conséquence, qu’en l’absence de promulgation de la loi par le soin du Président de la République contrairement aux dispositions de la Constitution, d’une part, sur le plan juridique, la loi est considérée comme n’avoir jamais existé, et d’autre part, elle ne revêt aucune valeur impérative et exécutoire ;

Considérant d’ailleurs, que la loi sus-évoquée n’a jamais pu être publiée dans un recueil officiel et donc n’a pas été portée à la connaissance du public par un mode normal de publicité qui est le journal officiel ;

Que les dispositions de la loi ne peuvent produire aucun effet sur le plan juridique suite à sa non publication ;

Considérant alors qu’il n’y a pas lieu d’annuler une loi dont l’existence n’a pas pu être certifiée et qu’en tant que de besoin, le Gouvernement est habilité, en tout moment, à concevoir un projet de loi sur les exportations ;

Considérant qu’en effet, aux termes des dispositions de l’article 86 de la Constitution du 11 décembre 2010 « l’initiative des lois appartient concurremment au Premier Ministre, aux Députés et aux Sénateurs » et que « les projets de lois sont délibérées en conseil des Ministres et déposés sur le bureau de l’une des Assemblées » ;

Considérant que dans le contexte de la période de transition, les fonctions des deux Assemblées sont exercées par le congrès de Transition et le Conseil Supérieur de la Transition ;

Considérant que dans le respect de la procédure législative normale, toute loi adoptée par le parlement de transition, pour pouvoir revêtir une valeur impérative et exécutoire, doit être promulguée par le Président de la Transition suite à la décision de conformité à la Constitution de la loi par la Haute Cour Constitutionnelle, et ce conformément aux dispositions des articles 59 et 117 de la Constitution du 11 décembre 2010 ;

PAR CES MOTIFS
EMET L’AVIS QUE

Article premier : La loi sur les exportations adoptée par le parlement en octobre 2008 mais non promulguée par le Président de la République ne revêt aucune existence juridique et aucune valeur impérative et exécutoire, donc réputée n’avoir jamais produit d’effet ;

Article 2. – Le Premier Ministre, Chef du Gouvernement, dispose de l’initiative des lois et est habilité, si besoin est, à concevoir un projet de loi sur les exportations, ledit projet devant être délibéré en Conseil des Ministres et déposé sur le bureau de l’un des deux chambres du parlement de la Transition ;

Article 3. – La loi adoptée par le parlement de la Transition requiert valeur exécutoire après sa promulgation par le Président de la Transition dans le délai imparti par la Constitution et suite à la décision de conformité de la loi à la Constitution par la Haute Cour Constitutionnelle.

Article 4.- Le présent avis sera publié au journal officiel de la République.

Ainsi délibéré en audience privée tenue à Antananarivo, le jeudi deux août l’an deux mil douze à dix heures, la Haute Cour Constitutionnelle étant composée de :
M. RAJAONARIVONY Jean Michel, Président
Mme RAHALISON RAZOARIVELO Rachel Bakoly, Haut Conseiller
M RABENDRAINY Ramanoelison, Haut Conseiller
M. ANDRIAMANANDRAIBE RAKOTOHARILALA Auguste, Haut Conseiller
M. RABEHAJA-FILS Edmond, Haut Conseiller
M. RAKOTONDRABAO ANDRIANTSIHAFA Dieudonné, Haut Conseiller
et assistée de Maître RALISON Samuel Andriamorasoa, Greffier en Chef.