La Haute Cour Constitutionnelle,
Vu la Constitution ;
Vu l’ordonnance n°2001-003 du 18 novembre 2001 portant loi organique relative à la Haute Cour Constitutionnelle ;
Les rapporteurs ayant été entendus ;
Après en avoir délibéré conformément à la loi ;
En la forme

1. Considérant que par requête en date du 28 mars 2018, Maître Christian F. RAOELINA, Avocat au Barreau de Madagascar, Conseil du sieur RAZAFINDRAVONONA Jean, demande à la Haute Cour Constitutionnelle de constater l’anti-constitutionnalité des actes pris par le Procureur de la République et le Juge d’instruction de la Chaîne Pénale Anti-Corruption à l’encontre du sieur RAZAFINDRAVONONA Jean, poursuivi pour divers détournements de deniers publics, complicité de faux et usage de faux et abus de fonction, aux motifs qu’ au moment des faits à lui reprochés, l’intéressé était membre du Gouvernement donc « pénalement responsable devant la Haute Cour de Justice » en vertu des dispositions de l’article 133 de la Constitution ;

2. Considérant que par une autre requête en date du 30 mars 2018, Maître Ferdinand RANARY RAKOTOARISOA, Avocat au Barreau de Madagascar, Conseil du même sieur RAZAFINDRAVONONA Jean, demande à la Cour de céans de statuer sur l’exception d’inconstitutionnalité qu’il a soulevée contre la procédure et les actes pris par le Juge d’instruction près de la Chaîne Pénale Anti-Corruption à l’encontre du sieur RAZAFINDRAVONONA Jean, poursuivi pour les mêmes infractions que ci-dessus et pour les mêmes motifs;

3. Considérant que les deux dossiers présentent un lien de connexité ; qu’il y a lieu de les joindre pour être statué par une seule et même décision ;

4. Considérant que, par sa requête, Maître Christian F. RAOELINA saisit directement la Cour de céans par voie d’action ; que si la procédure par voie d’action est prévue par la Constitution, la Loi fondamentale prévoit une procédure de saisine restreinte aux autorités publiques ;

5. Considérant que la Constitution a limité la possibilité de saisine par voie d’action au Président de la République (article 117 alinéa premier), aux chefs d’institution, c’est-à-dire le Premier ministre, le Président du Sénat et le Président de l’Assemblée nationale, au quart des membres composant l’une des Assemblées parlementaires, aux organes des Collectivités territoriales décentralisées, au Haut Conseil pour la Défense de la Démocratie et de l’Etat de droit (article 118 alinéa premier) ;

6. Considérant ainsi que, selon la Constitution, le juge constitutionnel ne peut être saisi directement par voie d’action individuelle ; qu’en conséquence, la requête de Maître Christian F. RAOELINA, n’est pas recevable en la forme ;

7. Considérant qu’aux termes de l’article 118 alinéa 2 de la Constitution : « Si, devant une juridiction, une partie soulève une exception d’inconstitutionnalité, cette juridiction sursoit à statuer et saisit la Haute Cour Constitutionnelle qui statue dans le délai d’un mois » ; que selon l’article 28 de l’ordonnance n°2001-003 sus visée, « La Haute Cour Constitutionnelle connaît également des exceptions d’inconstitutionnalités soulevées par les parties devant les juridictions de tous ordres » ; que l’obligation de renvoyer la question de constitutionnalité au juge constitutionnel constitue une question préjudicielle ;

8. Considérant que, de ce qui précède, l’exception d’inconstitutionnalité doit être soulevée devant la juridiction saisie de la procédure mise en cause ; que cette juridiction, après avoir rendu une décision de sursis à statuer, doit saisir elle-même la Haute Cour Constitutionnelle ; qu’ainsi, la requête, introduite directement devant la Cour de céans par Maître Ferdinand RAKOTOARISOA RANARY, doit être déclarée irrecevable en la forme ;

EN CONSEQUENCE,
D E C I D E :

Article premier. Les requêtes de Maître Christian F. RAOELINA et de Maître Ferdinand RANARY RAKOTOARISOA, Avocats au Barreau de Madagascar, Conseils du sieur RAZAFINDRAVONONA Jean, tendant à faire déclarer inconstitutionnels les actes pris par le Procureur de la République et le Juge d’instruction de la Chaîne Pénale Anti-Corruption, sont jointes.

Article 2.– Lesdites requêtes sont déclarées irrecevables, en la forme.

Article 3.– La présente Décision sera notifiée aux requérants et publiée au Journal officiel de la République.

Ainsi délibéré en audience privée tenue à Antananarivo, le mercredi onze avril deux mille dix-huit à dix heures, la Haute Cour Constitutionnelle étant composée de :

Monsieur RAKOTOARISOA Jean-Eric, Président
Madame ANDRIANARISOA RAVELOARISOA Fara Alice, Haute Conseillère-Doyenne
Monsieur TSABOTO Jacques Adolphe, Haut Conseiller
Monsieur TIANDRAZANA Jaobe Hilton, Haut Conseiller
Madame RAMIANDRASOA Véronique Jocelyne Danielle, Haute Conseillère
Monsieur DAMA Andrianarisedo Retaf Arsène, Haut Conseiller
Madame RANDRIAMORASATA Maminirina Sahondra, Haute Conseillère
Monsieur ZAFIMIHARY Marcellin, Haut Conseiller
Madame RABETOKOTANY Tahina, Haute Conseillère ;

Et assistée de Maître RALISON Samuel Andriamorasoa, Greffier en Chef.