La Haute Cour constitutionnelle,

Vu la Constitution ;

Vu l’ordonnance n°2001-003 du 18 novembre 2001 portant loi organique relative à la Haute Cour constitutionnelle ;

Le rapporteur ayant été entendu ;

Après en avoir délibéré conformément à la loi ;

EN LA FORME

  1. Considérant que par lettre n°053-PM/SP du 16 mars 2020, enregistrée le même jour au greffe de la juridiction de céans, le Premier ministre, Chef du Gouvernement, saisit le Président de la Haute Cour constitutionnelle, conformément aux dispositions de l’article 119 de la Constitution, aux fins de demander l’avis de la Cour de céans sur la nécessité ou non de constituer une commission mixte paritaire, en application de l‘article 96 alinéa 3 de la Constitution ;
  1. Considérant qu’aux termes de l’article 119 de la Constitution, « La Haute Cour constitutionnelle peut être consultée par tout Chef d’institution et tout organe des collectivités territoriales décentralisées pour donner son avis sur la constitutionnalité de tout projet d’acte ou sur l’interprétation d’une disposition de la présente Constitution» ;
  1. Que s’agissant d’un avis sur le sens et l’interprétation d’un article de la Constitution présenté par un Chef d’institution, en l’occurrence le Premier ministre, Chef du Gouvernement, la présente demande est régulière et recevable ;

AU FOND

  1. Considérant que selon l’article 87 de la Constitution, les lois organiques, les lois de finances et les lois ordinaires sont votées par le Parlement ; que cela signifie que les projets et propositions de loi sont examinés successivement par les deux assemblées du Parlement pour aboutir à un texte identique ; qu’un texte adopté en termes

Identiques par l’Assemblée nationale et le Sénat est définitif : il constitue le texte de la loi ;

  1. Que la procédure conduisant à l’adoption définitive d’un projet ou d’une proposition de loi consiste en un mouvement de va-et-vient du texte entre les deux assemblées ; que l’adoption de la loi se fait normalement à l’issue de la navette ; que la navette prend fin lorsqu’une assemblée adopte sans modification, pour chacun de ses articles, le texte précédemment adopté par l’autre ; que dans l’hypothèse où un désaccord persiste entre l’Assemblée nationale et le Sénat, le gouvernement dispose d’une procédure lui permettant le cas échéant de donner le dernier mot à l’Assemblée nationale ; que la Constitution a institué une procédure de conciliation permettant au gouvernement d’accélérer le vote définitif d’un texte en interrompant le cours normal de la navette ;
  1. Considérant que la problématique de la présente demande d’avis a trait à la nécessité ou non de recourir à la procédure de conciliation suite au fait que l’Assemblée nationale et le Sénat, lors de la session extraordinaire du 4 au 15 mars 2020, ne sont pas parvenus, tel que l’exige l’alinéa 2 de l’article 96 de la Constitution, à s’entendre sur un texte unique dans le cadre de l’adoption de l’avant-projet de loi n°001/2020 du 26 février 2020 ;
  1. Considérant que le mécanisme de la procédure de conciliation est précisé par l’article 96 alinéa 3 de la Constitution selon lequel, « Lorsque par suite d’un désaccord entre les deux assemblées, un projet ou une proposition de loi n’a pu être adopté après deux lectures par chaque assemblée ou si le gouvernement a déclaré l’urgence après une seule lecture par chacune d’elle, le Premier ministre a la faculté de provoquer la réunion d’une commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion » ; que la mise en place d’une commission mixte paritaire est ainsi incontournable pour interrompre le cours normal de la navette ;
  1. Considérant que, lorsque la procédure paritaire n’aboutit pas, l’alinéa 4 de l’article 96 de la Constitution permet au Gouvernement de mettre un terme à la navette ; d’après les dispositions de cet article, « si la commission ne parvient pas à l’adoption d’un texte commun ou si ce texte n’est pas adopté dans les conditions prévues à l’alinéa précédent, l’Assemblée nationale statue définitivement à la majorité absolue des membres la composant »;

En conséquence,

la Haute Cour Constitutionnelle

émet l’Avis que :

 

Article premier.- La convocation d’une commission mixte paritaire est incontournable en application de l’article 96 alinéa 3 de la Constitution.

Article 2.- En cas d’échec de la commission mixte paritaire, l’Assemblée nationale statue définitivement à la majorité absolue des membres la composant.

Article 3.- Le présent Avis sera notifié au Premier ministre, Chef du gouvernement, et publié au Journal officiel de la République.

Ainsi délibéré en audience privée tenue à Antananarivo, le jeudi dix-neuf mars l’an deux mille vingt à dix heures, la Haute Cour Constitutionnelle étant composée de :

Monsieur RAKOTOARISOA Jean-Eric, Président

Madame ANDRIANARISOA RAVELOARISOA Fara Alice, Haute Conseillère-Doyenne

Monsieur TSABOTO Jacques Adolphe, Haut Conseiller

Monsieur TIANDRAZANA Jaobe Hilton, Haut Conseiller

Madame RAMIANDRASOA Véronique Jocelyne Danielle, Haute Conseillère

Monsieur DAMA Andrianarisedo Retaf Arsène, Haut Conseiller

Madame RANDRIAMORASATA Maminirina Sahondra, Haute Conseillère

Monsieur ZAFIMIHARY Marcellin, Haut Conseiller

Madame RABETOKOTANY Tahina, Haute Conseillère ;

et assistée de Maître RALISON Samuel Andriamorasoa, Greffier en Chef.