La Cour Electorale Spéciale ;

 

Vu la Constitution ;
Vu la loi organique n°2012-005 du 22 mars 2012 portant Code électoral ;
Vu la loi organique n°2012-015 du 1er août 2012 relative à l’élection du premier Président de la Quatrième République ;
Vu la loi n°2011-014 du 28 décembre 2011 portant insertion dans l’ordonnancement juridique interne de la Feuille de route ;
Vu la loi n°2012-014 du 30 juillet 2012 portant création d’une chambre spéciale dénommée Cour Electorale Spéciale au sein de la Haute Cour Constitutionnelle ;
Vu l’ordonnance n°2001-003 du 18 novembre 2001 relative à la Haute Cour Constitutionnelle ;
Vu le décret n°2012-978 du 7 novembre 2012 portant constatation de la nomination des membres élus au sein de la chambre spéciale dénommée « Cour Electorale Spéciale » (CES) au sein de la Haute Cour Constitutionnelle ;

Les rapporteurs ayant été entendus ;

Après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Considérant que par lettre n°200-PM/SGG/13 du 14 mai 2013, le Premier Ministre, Chef du Gouvernement, demande l’avis de la Cour Electorale Spéciale sur les textes régissant le cas des autorités politiques, candidates à l’élection présidentielle, appelées à démissionner ;

Considérant qu’aux motifs de sa demande, le Premier Ministre, Chef du Gouvernement expose que :

« Les dispositifs (article 9 et 10) de votre décision n°01-CES/D du 03 mai 2013, sur la démission des autorités politiques candidats à l’élection présidentielle du 24 juillet 2013, ont donné lieu à diverses interprétations au sein du Gouvernement.

En effet, selon l’article 7, alinéa 4, de la loi organique n°2012-005 du 27 mars 2012 portant code électoral, « Toute autorité politique doit démissionner de ses fonctions à compter de la date de publication de la liste officielle des candidats ».

Le paragraphe 14 de la Feuille de route stipule cependant que « Le Président de la Transition, le Premier Ministre de consensus et les Membres du Gouvernement sont tenus de démissionner de leurs fonctions 60 jours avant la date du scrutin s’ils décident de se porter candidat aux élections législatives et présidentielles … ».

Lequel de ces deux textes régirait ainsi le cas d’une « autorité politique » candidate à l’élection présidentielle ?

Il paraît important de relever que certes la loi organique n°2012-005 du 27 mars 2012 portant code électoral, est la norme juridique postérieure mais il n’en demeure pas moins que la loi n°2011-014 du 28 décembre 2011 portant insertion de la Feuille de route dans l’ordonnancement juridique, « figure parmi les sources du droit transitoire devant servir à la mise en œuvre des engagements des acteurs politiques malgaches en vue de la mise en place d’un Parlement de transition et d’un Gouvernement d’union nationale , de l’organisation d’élections crédibles, justes et transparentes en coopération avec la communauté internationale… » (Décision n°15-HCC/D3 du 26 décembre 2011). Par conséquent, le Code électoral, texte général, serait censé ne pas déroger à cette dernière, texte particulier et, de surcroit, valant droit transitoire régissant la période de transition.

S’agissant des candidats exerçant un mandat de membre du Conseil Supérieur de la Transition et du Congrès de la Transition, ils seraient considérés comme « exerçant un mandat public » et à ce titre, appelés à démissionner de leurs fonctions 60 jours avant la date du scrutin, en application de l’article 5 de la loi organique n°2012-015 du 1er août 2012.

C’est ainsi aux fins de tenter de trouver les voies et moyens de mettre fin à la confusion qui règne autour des conditions de démission des autorités politiques candidates à l’élection présidentielle, que, au nom du Gouvernement d’Union Nationale, la présente demande d’avis est émise ».

Considérant que d’une part, la Cour Electorale Spéciale exerce les attributions de la Haute Cour Constitutionnelle en matière électorale et que l’objet de la demande relève bien de cette matière ;

Que d’autre part, la demande d’avis émane du Premier Ministre en sa qualité de Chef d’Institution ;

Qu’il y a lieu de déclarer la demande recevable ;

Considérant qu’aux termes de l’article 7, alinéa 4, de l’ordonnance n°2012-005 du 22 mars 2012 portant Code électoral, « Toute autorité politique doit démissionner de ses fonctions à compter de la date de publication de la liste officielle des candidats » ;

Qu’aux termes de l’article 5 de la loi organique n°2012-015 du 1er août 2012 relative à l’élection du premier Président de la Quatrième République, « Tout candidat aux fonctions de premier Président de la Quatrième République qui exerce un mandat public est appelé à démissionner de ses fonctions 60 jours avant la date du scrutin … » ;

Considérant que l’utilisation par la législation du terme générique « mandat public » sans aucune précision, est susceptible de provoquer diverses interprétations ;

Qu’en effet, le terme « mandat public » peut aussi bien s’appliquer aux autorités étatiques nommées qu’aux titulaires d’un mandat électif ;

Considérant dans ces conditions que les dispositions de l’article 5 de la loi organique n°2012-015 susvisée, risquent d’être en contradiction avec celles de l’article 7 de l’ordonnance portant Code électoral ; qu’il y aurait lieu de déterminer la norme applicable ;

Considérant qu’il n’est pas contesté que les premières élections présidentielle et législatives sont organisées en application de dispositions de la Feuille de route pour la sortie de crise à Madagascar insérée dans l’ordonnancement juridique interne par le biais de la loi n°2011-014 du 28 décembre 2011 ;

Qu’il demeure également que lesdites dispositions se trouvent à la base des engagements des acteurs politiques malgaches ainsi que des Institutions de la Transition ; qu’en cas de contradiction relevées dans la législation transitionnelle, elles pourraient servir de référence ;

Considérant en ce sens qu’aux termes du paragraphe 14 de la Feuille de route, « Le Président de la transition, le Premier Ministre de consensus et les membres du Gouvernement sont tenus de démissionner de leurs fonctions 60 jours avant la date du scrutin s’ils décident de se porter candidat aux élections législatives et présidentielles » ;

Considérant par ailleurs qu’en matière électorale, le principe d’égalité de traitement des candidats doit être la règle sous peine de porter atteinte au bon déroulement du processus électoral ;

Que de ce qui précède, il y aurait lieu de considérer comme norme applicable les dispositions de l’article 5 de la loi organique n°2012-015 du 1er août 2012 relative à l’élection du premier Président de la Quatrième République qui, en l’état actuel de la situation constitue la législation spéciale destinée à régir une catégorie spécifique d’élection ;

Que par conséquent, la date de l’élection présidentielle étant fixée au 24 juillet 2013, conformément à la législation en vigueur, tous les candidats qui exercent un mandat public, dont le Président de la Transition, les membres du Gouvernement, les autorités politiques nommées, les membres du Conseil Supérieur de la Transition et ceux du Congrès de la Transition, sont tenus de démissionner de leurs fonctions au plus tard soixante jours avant la date du scrutin ;

Par ces motifs,

EMET L’AVIS QUE :

Article premier : La demande d’avis du Premier Ministre, Chef du Gouvernement sur les textes régissant le cas des autorités politiques, candidates à l’élection présidentielle, appelées à démissionner, est recevable.

Article 2. – Les dispositions de l’article 5 de la loi organique n°2012-015 du 1er août 2012 relative à l’élection du premier Président de la Quatrième République, constituent la norme applicable aux autorités politiques.

Article 3.- Le présent avis sera publié au journal officiel de la République.

Ainsi délibéré en audience privée tenue à Antananarivo, le mercredi quinze mai l’an deux mil treize à quatorze heures, la Cour Electorale Spéciale  étant composée de :

Monsieur RAJAONARIVONY Jean-Michel, Président
Monsieur RAVELONTSALAMA Bertholier, Membre
Monsieur RAHOERASON Emile, Membre
Monsieur RAVELOARIJAONA Boanary, Membre
Monsieur RAZAFIMANDIMBY Soloherinoro John, Membre
Madame RAZAFINDRAKOTO HARIMISA Noro Vololona, Membre
Madame ROBINSON Elisabeth Harinoro, Membre
Madame ANDRIANAY Noromalala Pierreline, Membre
Monsieur ANDRIANJANAHARY Philippe, Membre

et assistée de Maître RALISON Samuel Andriamorasoa, Greffier en Chef.