La Haute Cour Constitutionnelle,
Vu la Constitution ;
Vu l’ordonnance n°2001-003 du 18 novembre 2001 portant loi organique relative à la Haute Cour Constitutionnelle ;
Vu la loi déférée ;
Vu l’Accord portant révision de l’Accord Général de Coopération entre les pays membres de la Commission de l’Océan Indien (COI), signé aux Seychelles le 06 mars 2020 ;
Vu la Délibération n°02-HCC/DB du 17 septembre 2021 portant Règlement Intérieur de la Haute Cour Constitutionnelle, modifiée et complétée par la Délibération n°03-HCC/DB du 26 octobre 2021 ;
Le rapporteur ayant été entendu ;
Après en avoir délibéré conformément à la loi ;
EN LA FORME
1.Considérant que le Président de la République, par lettre n°166-PRM/SGP/SGA/DEJ/2022 du 26 décembre 2022, enregistrée le même jour au greffe de la Cour de céans, a saisi la Haute Cour Constitutionnelle, aux fins de contrôle de constitutionnalité, conformément aux dispositions de l’article 117 de la Constitution, préalablement à sa promulgation, de la loi n°2022-020 autorisant la ratification de l’Accord portant révision de l’Accord Général de Coopération entre les pays membres de la Commission de l’Océan Indien (COI), signé aux Seychelles le 06 mars 2020 ;
2.Considérant que d’après l’article 116.1 de la Constitution, la Haute Cour Constitutionnelle « statue sur la conformité à la Constitution des traités, des lois, des ordonnances et des règlements autonomes » ; que selon l’article 117 alinéa premier de la loi fondamentale : « Avant leur promulgation, les lois organiques, les lois et les ordonnances sont soumises obligatoirement par le Président de la République à la Haute Cour Constitutionnelle qui statue sur leur conformité à la Constitution» ;
Que l’alinéa 3 de l’article 137 de la Constitution ajoute que « Avant toute ratification, les traités sont soumis par le Président de la République, au contrôle de constitutionnalité de la Haute Cour Constitutionnelle. En cas de non-conformité à la Constitution, il ne peut y avoir ratification qu’après révision de celle-ci » ;
3.Considérant que la loi n°2022-020 a été adoptée par l’Assemblée Nationale et le Sénat en leurs séances respectives du 09 décembre 2022 et du 14 décembre 2022 ;
Que l’Accord a été signé par les parties le 06 mars 2020 ;
4.Considérant qu’il résulte des dispositions sus-rappelées que lesdits loi et Accorde sont soumise à un contrôle obligatoire de constitutionnalité ; que la saisine introduite par le Président de la République est régulière et recevable ;
AU FOND
Sur l’objet de l’Accord :
5.Considérant que l’article 1er de l’Accord fixe que « par le présent Accord, les Etats Partis réaffirment leur volonté de se regrouper au sein de la Commission de l’Océan Indien (COI). La COI dispose de la personnalité juridique sur le territoire de chaque Etat membre pour jouir :
- De la capacité juridique nécessaire à l’exercice des fonctions qui lui sont conférées par le présent Accord ;
- Du bénéfice des droits et obligations de toute propriété mobilière ou immobilière
Le siège de la COI est établie à Maurice » ;
Sur les missions assignées à la Commission
6.Considérant qu’aux termes de l’article 2 de l’Accord « La COI vise à promouvoir notamment :
- La coopération diplomatique ;
- La paix, la stabilité, la gouvernance et l’Etat de droit ;
- La défense des intérêts insulaires ;
- La coopération économique et commerciale ;
- La coopération dans le domaine de l’agriculture, de la conservation des ressources et des écosystèmes ;
- L’économie bleue ;
- La coopération dans le domaine culturel, scientifique, universitaire et éducatif ;
- La coopération juridique et en matière de Justice ;
- La sécurité alimentaire et sanitaire ;
- La sécurité maritime et la lutte contre la criminalité transnationale organisée ;
- La connectivité aérienne, maritime et numérique pour le rapprochement des peuples ;
- Le changement climatique ;
- La protection civile ;
- La circulation des personnes et des biens dans l’espace de la COI.
D’autres domaines de compétences peuvent être décidés d’un commun accord par les instances de la COI ».
7.Considérant que l’article 137 de la Constitution dispose que « Le Président de la République négocie et ratifie les traités. Il est informé de toute négociation tendant à la conclusion d’un accord international non soumis à ratification.
La ratification ou l’approbation de traités d’alliance, de traités de commerce, de traités ou
d’accord relatif à l’organisation internationale, de ceux qui engagent les finances de l’État y
compris les emprunts extérieurs, et de ceux qui modifient les dispositions de nature
législative, de ceux qui sont relatifs à l’état des personnes, des traités de paix, de ceux qui
comportent modification de territoire, doit être autorisée par la loi.
Avant toute ratification, les traités sont soumis par le Président de la République, au contrôle
de constitutionnalité de la Haute Cour constitutionnelle. En cas de non-conformité à la
Constitution, il ne peut y avoir ratification qu’après révision de celle-ci.
Les traités ou accords régulièrement ratifiés ou approuvés ont, dès leur publication, une
autorité supérieure à celle des lois, sous réserve, pour chaque accord ou traité, de son
application par l’autre partie » ;
8.Considérant que sont au nombre des matières que le constituant accepte comme susceptibles de faire l’objet de conventions internationales, les matières énumérées dans les articles 1er et 2 de l’Accord ;
Sur le mode de décision au sein de la Commission
9.Considérant qu’il résulte des termes du préambule de l’accord que le renforcement des liens d’amitié qui unissent les membres s’opère dans le respect de la souveraineté et de l’intégrité territoriale de chaque Etat et de l’égalité des Etats entre eux, et conformément au droit international et aux obligations qui en découlent ;
Que l’article 5 de l’Accord stipule que « La Commission de l’Océan Indien (COI) se prononce à l’unanimité de ses membres » ;
10.Considérant qu’aux termes des dispositions de l’article 1er de la Constitution : « Le peuple Malagasy constitue une Nation organisée en Etat souverain, unitaire, républicain et laïc.
Cet Etat porte le nom de « République de Madagascar ».
La démocratie et le principe de l’Etat de droit constituent le fondement de la République. Sa souveraineté s’exerce dans les limites de son territoire.
Nul ne peut porter atteinte à l’intégrité territoire de la République.
Le territoire de la République est inaliénable…… » ;
Que le préambule de la Constitution précise et souligne que la participation de la République de Madagascar dans le concert des nations est volontariste ; que dans cet esprit, le constituant entend exclure toute application des normes internationales sans son consentement sauf les règles coutumières du droit public international ;
Qu’eu égard aux dispositions combinées de la Constitution sus développées, ni l’esprit ni le texte de l’accord n’entrent en contradiction avec la Constitution ;
11.Considérant de tout ce qui précède qu’il y a lieu de déclarer l’Accord conforme à la Constitution ; que par voie de conséquence, la loi déférée en vue de sa ratification n’est pas contraire à la Constitution ;
EN CONSEQUENCE,
DECIDE :
Article premier. – La saisine du Président de la République est déclarée recevable.
Article 2– L’Accord portant révision de l’Accord Général de Coopération entre les pays membres de la Commission de l’Océan Indien (COI), signé aux Seychelles le 06 mars 2020 ainsi que la loi n°2022-020 autorisant la ratification dudit Accord, sont déclarés conformes à la Constitution.
Article 3– La présente décision sera notifiée au Président de la République, au Premier Ministre, Chef du Gouvernement, à la Présidente de l’Assemblée Nationale, au Président du Sénat, et publiée au Journal Officiel de la République.
Ainsi délibéré en audience privée tenue à Antananarivo, le mercredi premier février l’an deux mille vingt-trois à neuf heures trente minutes, la Haute Cour Constitutionnelle étant composée de :
Monsieur FLORENT Rakotoarisoa, Président
Monsieur NOELSON William, Haut Conseiller – Doyen
Madame RATOVONELINJAFY RAZANOARISOA Germaine Bakoly, Haut Conseiller
Madame RAKOTOBE ANDRIAMAROJAONA Vololoniriana Christiane,Haut Conseiller
Madame RAKOTONIAINA RAVEROHANITRAMBOLANIONY Antonia,Haut Conseiller
Monsieur MBALO Ranaivo Fidèle, Haut Conseiller
Monsieur RASOLO Nandrasana Merlin, Haut Conseiller
Madame RAZANADRAINIARISON RAHELIMANANTSOA Rondro Lucette,Haut Conseiller
Madame ANDRIAMAHOLY RANAIVOSON Rojoniaina, Haut Conseiller
Et assisté de Maître RALISON Samuel Andriamorasoa, Greffier en Chef.