HAUTE COUR CONSTITUTIONNELLE
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 COMMUNIQUE

 Compte tenu du contexte politique résultant de l’interprétation sciemment erronée de la décision n°12-HCC/D3 du 9 septembre 2023, la Haute Cour Constitutionnelle (HCC) tient à apporter les précisions suivantes :

Concernant le transfert des fonctions de Chef de l’Etat par intérim au « Gouvernement collégial »

Conformément à l’article 46 de la Constitution, l’ancien Président de la République RAJOELINA Andry Nirina a démissionné après que sa candidature a été acceptée suivant la décision n°11-HCC/D3 du 9 septembre 2023.

Ainsi, le poste de Président de la République est vacant. Par lettre déposée à la HCC, le Président du Sénat a fait part de sa « renonciation à l’exercice des fonctions de Chef de l’Etat par intérim pour des raisons personnelles ». Le Président du Sénat a confirmé sa renonciation à exercer les fonctions de Chef de l’Etat par intérim par un communiqué audio-visuel.

En conséquence, et conformément à l’article 52 alinéas 2 et 3 de la Constitution qui dispose que « Dès la constatation de la vacance de la présidence, les fonctions du Chef de l’Etat sont exercées par le Président du Sénat. En cas d’empêchement du Président du Sénat constatée par la Haute Cour Constitutionnelle, les fonctions de Chef de l’Etat sont exercées collégialement par le Gouvernement », la Haute Cour Constitutionnelle a confié les fonctions de Chef de l’Etat par intérim au Gouvernement collégial.

Suivant décision du 7 septembre 2018 n°30-HCC/D3, le même article a été utilisé lors de la vacance de poste du Président de la République et fait ainsi jurisprudence. De ce fait, c’est à tort de reprocher à la Haute Cour Constitutionnelle de se référer au même article.

Qu’aucun autre article dans la Constitution ne prévoit le transfert des pouvoirs du Président de la République à une personne ou à un organe autre que le Gouvernement collégial en cas d’empêchement du Président du Sénat sous quelque forme que ce soit, au risque de sortir du cadre constitutionnel.

Sur le fonctionnement et l’étendue des pouvoirs du Gouvernement exerçant collégialement les fonctions de Chef de l’Etat par intérim

Il convient de distinguer le Gouvernement exerçant collégialement les fonctions de Chef de l’Etat par intérim du Gouvernement exerçant ses attributions dévolues par la Constitution dans le cadre de la gestion des affaires de l’Etat.

  • Sur les attributions du Gouvernement exerçant collégialement les fonctions de Chef de l’Etat par intérim

En sa qualité de Chef du Gouvernement, le Premier Ministre est le Chef du Gouvernement collégial et préside le Conseil des Ministres.

Aucun des membres du Gouvernement collégial ne dispose de pouvoirs particuliers. La collégialité est fondée sur la règle de la prise de décision à la majorité des membres ; en cas de partage de voix, la voix du Chef du Gouvernement collégial est prépondérante.

« En cas de démission, de faute grave, de crime ou délit, ou de défaillance manifeste commis par un ou plusieurs membres du Gouvernement pouvant entraver le fonctionnement normal de l’action gouvernementale et l’efficacité des services publics concernés, le Gouvernement collégial sur proposition du Premier Ministre, Chef du Gouvernement, peut procéder à l’abrogation d’un membre du Gouvernement  et par la suite à la nomination de son  remplaçant ou de son intérim »  et ce, en application de l’article 54 alinéa 3 de la Constitution et de l’Avis n°12-HCC/AV du 9 septembre 2023.

Les membres du Gouvernement collégial ne bénéficient pas du “statut de Chef d’État”.

Le Gouvernement exerçant collégialement les fonctions de Chef de l’Etat ne peut pas jouir de toutes les attributions dévolues au Président de la République élu pour la raison que les attributions présidentielles relèvent du dépôt de la souveraineté nationale au moyen ou par voie de l’élection tel qu’il ressort de la décision n°12-HCC/D3 du 9 septembre 2023.

Les pouvoirs du Gouvernement collégial exerçant les fonctions de Chef d’État par intérim sont par conséquent circonscrits aux « attributions présidentielles courantes » et « aux affaires constituant la poursuite normale d’une procédure engagée avant la démission du Président de la République ». (Avis n°7-HCC/AV du 7 septembre 2018).

Conformément à l’Avis n°7-HCC/AV du 7 septembre 2018 relatif à une demande d’avis sur les attributions courantes du Président de la République, repris par la décision n°12-HCC/D3 du 9 septembre 2023, après la démission du Président de la République en exercice, sont suspendus les mécanismes constitutionnels tels que « l’empêchement », la « motion de censure » et la « dissolution de l’Assemblée Nationale » et ce, selon l’article 53 alinéa 2 de la Constitution.

  • Sur les attributions du Gouvernement exerçant ses attributions dévolues par la Constitution

Le Premier Ministre et le Gouvernement continuent d’exercer toutes les attributions qui leur sont dévolues par les articles 63, 65 et 66 de la Constitution, notamment la mise en œuvre de la politique générale de l’Etat. Le Premier Ministre dispose de l’Administration, s’assure de l’exécution des lois, assure la sécurité, la paix et la stabilité sur toute l’étendue du territoire national.

Concernant les attributions et le fonctionnement de la Haute Cour Constitutionnelle 

La HCC connait du contentieux électoral et proclame les résultats officiels des élections présidentielles et ce, en vertu de l’article 116-4° de la Constitution.

Il est utile de rappeler qu’en son article 5 alinéa 2, la Constitution dispose que « l’organisation et la gestion de toutes les opérations électorales relèvent de la compétence d’une structure nationale indépendante » laquelle a été mise en place par la loi n°2015-020 du 19 octobre 2015 relative à la Commission Electorale Nationale Indépendante. Cette structure est chargée du traitement et de la publication des résultats électoraux provisoires.

En tant que garante des régulations des fonctionnements des Institutions de l’Etat, la HCC appelle toutes les institutions ainsi que tous les organes administratifs et la société civile à exercer leurs rôles conformément aux lois en vigueur sur le territoire.

Enfin, la HCC rappelle que, selon l’article 5 de la Constitution, « la souveraineté appartient au peuple, source de tout pouvoir, qui l’exerce par ses représentants élus au suffrage universel direct ou indirect, ou par la voie du référendum. Aucune fraction du peuple, ni aucun individu ne peut s’attribuer l’exercice de la souveraineté ».

Ainsi sont garantis l’État de droit et la démocratie exercée par la voie des urnes.

Fait à Antananarivo, le 19 septembre 2023